34 – De Moscou à Saint-Pétersbourg
Le dimanche 16 mars 2008 par BalthazartMoscou
C’est donc en terre russe que j’emmène Friedrich pour la première fois en voyage. Les retrouvailles furent chaleureuses, il faut dire que je suis un peu son parrain ( je l’ai presque vu naître à Berlin ).
Une fois arrivés à l’aéroport de Sheremetyevo, nous expérimentons notre première file d’attente aux contrôles de l’immigration russe. Alors que nous nous amusons de nos noms écrits en cyrillique sur nos visas, Friedrich (Фридрих) me fait remarquer que deux mamies nous ont déjà grugés dans la queue, et s’engagent dans un corps à corps pour qui arrivera la première au guichet. Plutôt amusés par la situation, nous laissons faire. Une heure après, nous voilà quittant le hall. Les portes s’ouvrirent sur la zone des taxis, un froid profond nous aspira. A vrai dire nous fûmes tout deux figés et transis par les -15°C qui sévissaient dehors, bien évidemment n’ayant pas la fourrure de Friedrich, c’est plutôt moi qui faisait pâle figure. Très vite, on s’organisa pour ne pas rester plantés là et rejoindre notre hôtel.
Le soir même, Friedrich insista pour voir la Place Rouge. Nous firent la balade à pied et de nuit. Mais le vent, les distances, et le grand froid ont quelque peu freiné notre enthousiasme : nous avons ensuite très vite appris à utiliser le métro moscovite. La Place Rouge était certes vide, mais majestueuse. C’est très impressionnant comme endroit. Nous avons naturellement fini cette sortie par un chocolat chaud, non pas au café Pouchkine mais au Goum, ancien Grand Magasin d’Etat transformé en galerie marchande de luxe, avant de rentrer en métro, qui a lui seul vaut la visite.
N’ayant que quelques jours à Moscou, il était important de faire un crochet par les Galeries Tretiakov et Tretiakov de Krymski Val, hauts lieux de l’art russe. Si la première galerie est plutôt jolie, mais un brin ennuyeuse, la seconde galerie est un bâtiment très austère, même très laid, mais qui recèle pourtant de superbes tableaux. Notamment de nombreux artistes russes dont nous n’avions jamais entendu parlé, dans les avant-gardes des années 1910-1920. Côté jardin, sont exposées les statues déboulonnées des anciens dirigeants soviétiques, une sorte de cimetière où l’on a fait une petite balade. Après avoir longé longuement la Moskova, nous atteignons finalement la grande cathédrale du Christ-Sauveur. Un petit tour rapide pour découvrir l’intérieur majestueux et extrêmement chargé en dorures, nous décidâmes de finir la visite du quartier par le Musée des Beaux-arts Pouchkine juste à côté, pour terminer cette journée « musées ».
Le lendemain fut presque uniquement consacré à la visite du Kremlin, lieu central du pouvoir en plein centre de Moscou. Après une fouille et deux contrôles, nous entrons enfin dans le château. Il nous apparaît clairement que cet endroit n’est pas un lieu comme les autres. Malheureusement Friedrich devra rester bien sage dans mon sac et fera les visites incognito. De la salle des armures, des oeufs Fabergé aux bijoux des tsars, que de trésors à l’intéreur de cette forteresse ! Dans la salle des carrosses nous nous attendrissons devant un luxueux traîneau, qui permettait de faire en 7 jours le voyage Moscou-St-Pétersbourg, aux temps où le train n’existait pas encore. Direction la place des cathédrales qui regroupe de superbes églises orthodoxes, que de jeunes étudiants en arts restaurent en enlevant la couche d’enduit blanc déposé par les bolcheviks pour effacer les chatoyantes couleurs des icônes religieuses. Un travail titanesque.. Cependant après tout ce faste de dorure et un rapide tour de ces temples, Friedrich manifeste son ras-le-bulbe des églises et me presse de sortir du lieu. A distance, son papa-Niklas lui rétorqua que la prochaine fois ce sera le Kremlin-Bicêtre qu’il visitera, et qu’il devrait mesurer sa chance d’être déjà entré ici. La nuit tombe doucement, un petit tour sur la Place Rouge à nouveau, et nous retournons à l’hôtel presque épuisés.
Mardi matin, nous firent des balades dans les quartiers autour de la Place Rouge, Kitaï-Gorod, la rue Tverskaïa et le quartier piéton de l’Arbat avec ses artistes. Nous arpentâmes les longues avenues, sans but précis sinon que celui de faire quelques photos par-ci par-là. Découvrir quelques endroits cachés au hasard de la balade, se perdre un peu.. Mais c’est déjà notre dernière journée à Moscou, je sens bien que Friedrich quitte la capitale à regret, car il s’était entiché d’une starlette locale, qu’il croisait parfois sur les murs de la ville. Mais je me dis que la perspective de nouvelles aventures à Saint-Pétersbourg lui fera peut-être oublier cet amour de vacances.
Une fois les bagages pliés, direction la Gare de Leningrad en reprenant le superbe métro. Ayant vu large dans les horaires, nous errons dans cette immense gare ou tout semble érigé à la gloire de Lénine. Une heure après, nous nous apprêtons à gagner notre train sur un quai balayé par la neige. Le train Nikolaïevski Express est aussi un véritable voyage dans le temps, où rien ne semble avoir changé depuis des décennies. La déco est un dépaysement total, et finalement donne beaucoup de charme à ce voyage. Une vieille employée en chapka et costume militaire (d’époque elle aussi) nous accueille gentiment dans notre compartiment en nous servant un thé au citron. Nous discutâmes longuement avec Serguei, notre compagnon de voyage, avant de nous endormir, bercés par le roulement du train.
Saint-Pétersbourg
Vers 7h du matin, nous arrivâmes à Saint-Pétersbourg. Arrivée un peu violente, car nous avons l’impression d’avoir quitté trop vite la couette pour être jetés dans le froid matinal. Perdus et mal réveillés, nous pénétrons dans la gare, où une musique militaire semble nous accueillir en grande pompe. A nouveau jetés dans la rue, nous faisons face maintenant à la Perspective Nevski, axe principal de la ville que nous traverserons de long en large au cours de notre séjour. Une fois délestés de nos bagages, nous partons à la découverte de la Venise du nord. Bien évidemment, comme il était tôt, la ville offrait un décor particulier, comme vidée de ses habitants, une atmosphère un peu étrange. La grande différence avec Moscou, c’est la beauté et la couleur des bâtiments. Mais pour les amoureux de l’hiver, l’intérêt de Saint-Pétersbourg en cette période, ce sont ses canaux gelés que l’on enjambe en empruntant de petits ponts. Direction le Palais d’hiver et sa place, endroit qui vit l’histoire des Russes basculer.
L’endroit est saisissant, nous y apprendrons que l’agencement des fenêtres et des bâtiments ont été calculés pour donner une impression de grandeur à la place. Pourtant celle-ci est défigurée par la présence d’une horrible patinoire en son centre, ce qui gâche clairement la perspective. Comme nous reviendrons pour visiter l’Ermitage, nous ne nous y éternisons pas. Nous entreprenons de suivre les canaux au hasard pour découvrir « Piter ». La ville de Pierre le Grand semble dessinée pour offrir à chaque détour une perspective ou une géométrie intéressante. Longeant l’Amirauté et rattrapant les canaux, nous apercevons le Palais Ioussoupov où mourût le célèbre Raspoutine jeté dans les glaces du canal. Brrr
Le lendemain fut consacré pour l’essentiel à la visite du Musée de l’Ermitage, la météo étant pluvieuse, cela tombait à pic. Le musée est immense, il nous fallait donc cibler les expositions, car il y a tellement de choses à y voir. N’étant pas très fan de dorures et autres enfilades d’apparats, nous nous sommes concentrés sur les arts du 19ème et 20ème siècle, les impressionnistes et toute la clique. Comme toujours, que de bonnes surprises. Nous avons donc passé la matinée et l’après-midi à découvrir les salles, les collections, les palais regroupés dans l’ensemble de l’Ermitage. En fin de journée, nous avons tenté une balade près de l’Amirauté pour voir la célèbre statue de Pierre le Grand, mais la météo ne nous a vraiment pas fait de cadeau. Friedrich pose tristement sur la rive de la Neva.
Nous nous sommes rapidement réfugiés en face, à La Kunstkamera, qui abrite le musée d’Ethnologie et le Cabinet de curiosités de Pierre le Grand. Ce cabinet des horreurs composé essentiellement de bébés difformes conservés dans du formol devait faire sensation à l’époque, il y aussi de gros insectes et des dentitions humaines car Pierre le Grand arrachait lui-même les dents de ses ministres ! Friedrich ne se sentait pas très bien, moi non plus, je lui proposais de retourner vers le centre et de se trouver un café pour déguster quelques pâtisseries. Le soir nous nous sommes endormi devant le programme tv, qui proposait une version du Loft locale, дom-2, un peu plus violente que chez nous et combien inintéressante. Après l’Ermitage c’était un peu pathétique…
Vendredi nous avons décidé de nous balader vers Fontanka et Moika. Friedrich voulut voir le théâtre Mariinski et la rue de l’architecte Carlo Rossi et ses proportions parfaites, mais tout était en travaux… alors nous sommes allés plus loin vers la forteresse Pierre-et-Paul, observer les plaques de glace à la surface de la Neva. L’endroit semblait désert, nous avons longé la forteresse côté fleuve, et surprise, à un endroit nous avons vu des « Morses » dans la Neva. En fait, il s’agit d’un groupe de retraités qui ont l’habitude de se baigner dans les eaux gelées et poussant les morceaux de glace pour nager. Mais le plus intéressant fut le ciel. La lumière était incroyable à cet endroit. De retour vers le centre en passant à côté du croiseur Aurore, nous avons traîné dans la grande galerie marchande Gostiny Dvor pour trouver un endroit où dîner. Nous avions remarqués l’omni-présence militaire plus que les autres jours, notamment beaucoup de jeunes en chapka et épais manteaux, c’était en fait le Jour des Défenseurs de la Patrie. Ce qui permis de faire des clichés, très… soviétiques.
Le matin suivant, Friedrich voulut à nouveau voir ce ciel si particulier de Saint-Pétersbourg. Il ne nous restait que quelques heures avant de décoller de l’aéroport de Pulkovo.